Réinventer nos entrées de ville : un engagement pour l’avenir
Cette semaine ont eu lieu les Assises Nationales du Logement et de la Ville lors desquelles, j’ai eu le plaisir de participer à la table ronde « Renouveau des entrées de ville et des ZAC — quand la mixité urbaine reprend la main. ».
De retour sur les terres avignonnaises, je souhaite par ce texte partager avec vous le projet que j’y ai présenté.
Dans un monde où le dérèglement climatique pourrait conduire à un réchauffement de la planète de +4°C à l’horizon 2100, notre manière de concevoir la ville ne peut plus rester figée.
Les zones commerciales, souvent implantées en périphérie et en entrées de ville, apparaissent aujourd’hui comme des symboles d’un urbanisme daté : boîtes à chaussures métalliques, mers d’asphalte, dépendance à la voiture… Ces espaces sont devenus, au fil du temps, des radiateurs urbains, à la fois énergivores, imperméables et de moins en moins attractifs.
Mais il ne s’agit pas seulement d’un enjeu environnemental. Ces zones sont aussi économiquement fragilisées par l’évolution des usages, du commerce en ligne, des attentes sociales. Dans l’imaginaire collectif, elles incarneraient même une "France moche", à l’esthétique douteuse ponctuée de ronds-points, de rivières de bitume, et de bâtiments standardisés.
Pourtant, dans un contexte de crise du logement, de sobriété foncière, et de besoin de mixité urbaine, ces friches de la modernité représentent désormais une opportunité immense.
C’est particulièrement le cas pour Avignon.
Réinventer les ZAC : faire ville autrement -
À Avignon, nous avons décidé de ne pas attendre. Portée par une vision volontariste de transition écologique, sociale et urbaine, la ville s’est engagée à transformer ces zones en véritables morceaux de ville.
Le guide Habiter la Ville de Demain, que j’ai initié à la suite des travaux des Ateliers Bénezet, fixe un cap clair : sobriété foncière, confort d’été, biodiversité, économie circulaire, maîtrise des prix et exigence d’usage.
C’est dans cet esprit qu’Avignon a été lauréate en 2024 de l’appel à projets national pour la transformation des zones commerciales. Une reconnaissance qui confirme la pertinence de notre démarche et donne un coup d’accélérateur à notre projet.
La zone commerciale Cristole / Castellette : un laboratoire urbain -
Prenons un exemple concret avec la zone commerciale Cristole / Castellette, située au sud d’Avignon, sur l’axe stratégique de la route de Marseille.
Ce secteur, typique du développement commercial des années 70-80, concentre tous les défis du XXIe siècle : constructions obsolètes, accès prioritairement motorisés, espaces très bitumés, fonctions mono-orientées.
Mais il est aussi situé au croisement de quartiers d’habitation (Saint-Chamand), d’un pôle économique d’innovation (Agroparc), d’un quartier d’habitat durable méditerranéen (Bel Air), et de l’un des poumons vert de la ville (la Ceinture Verte agricole). Cette zone constitue donc une rotule urbaine, aujourd’hui disjointe, que nous voulons reconnecter.
La vocation commerciale de ce secteur subit de plein fouet la mutation des modes de consommation lorsqu’en France, entre 2016 et 2024, le e-commerce est passé de 71 milliards d’euros de chiffre d'affaires à 174 milliards d’euros. La vacance commerciale, si elle reste contenue sur l’ensemble du périmètre (moyenne de 13%), augmente fortement dans la galerie marchande.
Puisque l’action politique passe par la prévision, par l’anticipation, ce pixel de ville qui s’annonce défaillant à brève échéance si rien ne change, devient une magnifique opportunité de redonner des couleurs à notre urbanisme.
Objectif : transformer ce cluster de commerces périphériques en un quartier vivant, multifonctionnel et climatiquement résilient.
Une méthode : l’urbanisme de la coopération
Cette transformation ne peut pas être imposée d’en haut. Le temps où la puissance publique achetait immeubles et terrains pour déployer un plan est révolue. Ni l’état des finances publiques, ni le besoin grandissant de partage de la décision ne le permettrait.
Aussi, pour en garantir le succès, il convient de la faire reposer sur un travail collectif associant les institutions, les commerçants, les entreprises, les habitants. Grâce au programme national, nous avons mobilisé une équipe de maîtrise d’œuvre pluridisciplinaire – urbanistes, paysagistes, architectes, experts commerciaux – pour bâtir un schéma directeur ancré dans les réalités du terrain, et qui nous accompagne dans ces temps de concertation.
Les premiers ateliers ont permis d’acculturer les acteurs publics et privés aux enjeux de chacun : sobriété, mixité, adaptation climatique, performance économique, accessibilité. Un calendrier d’action est mis en place, entre diagnostics, scénarios, et concertations. Et les premières réalisations concrètes sont attendues dans les toutes prochaines années.
Une trajectoire lucide et partagée vers une obligation de résultat pour les générations à venir
Nous savons que la route vers le succès sera exigeante : la maîtrise foncière est morcelée, les finances publiques contraintes, les attentes sont multiples entre les acteurs économiques et les institutions publiques. Mais nous avançons avec confiance. Car ce projet a pour ambition de repenser la ville à l’échelle d’une génération.
Car c’est bien à cette échelle de temps que nous mesurons le succès des décisions prises aujourd’hui. Agir est un impératif pour nous, et pour l’avenir de nos enfants.